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St Seiya : Knight of the Zodiac (2019-)

Toei Animation

Aujourd’hui, je vais parler de la série ‘Saint Seiya : Knight of the Zodiac’ produite par Netflix en 2019. Mais je n’ai pas tant à dire que ça dessus et c’est surtout un prétexte pour parler de Saint Seiya, en Français Les chevaliers du zodiaque dont c’est le remake.

Saint Seiya donc est un manga de Masami Kurumada des années 80 et son adaptation en dessin animé a été un des fers de lance de la poularité de l’anime en France sous le nom des Chevaliers du Zodiaque.
Comment résumer ? En fait, pour ma part quand j’ai découvert la série étant petit, la différence que je faisais avec les autres séries avec des gars avec des pouvoirs qui combattent des méchants, c’étaient que ces personnages représentaient chacun une constellation et que beaucoup de combats consistaient en le héros qui se faisait battre, se relevait indéfiniment puis terrassait son adversaire grâce à la force de l’amour, de la loyauté, de la justice entre autres flamboyantes valeurs. Même à l’époque, les autres séries du genre cherchaient à être plus subtiles et à donner plus de suspense et de variété à leurs combats. Dans le fond, ça se ramenait tout de même globalement à ça avec par exemple le coup du super pouvoir impressionnant qui se révèle quand la situation est désespérée.
Mais dans le même temps, ils avaient de jolies armures et quand on en est arrivé aux personnages représentant les constellations qui sont aussi des signes du zodiaque, c’était l’occasion de débats enflammés dans la cour de récréation pour défendre son signe astrologique. Et clairement, j’étais et je suis encore sensible aux références aux mythologies européennes.

La série est de base confuse. Je n’ai vraiment compris le scénario, autant son aspect tragique et son coté épique, bien plus tard. Même en revoyant la série plusieurs années après en ayant lu le manga et en sachant là où ça allait, j’ai vu qu’il était difficile de comprendre que l’immense majorité des conflits de l’histoire sont provoqués par la manipulation et que la plupart du temps il s’agit d’une lutte fratricide entre représentants du même camp.
En partie, la faute au doublage français qui s’emmêle quelque fois dans les noms et dans lesquelles certaines discussions sérieuses sont transformées. C’est véridique, un dialogue durant lequel les héros s’interrogent sur l’identité d’un ennemi avant d’aller l’affronter, les répliques de la version française sont les personnages qui se demandent s’ils vont manger du poulet. Il est probable que les adaptateurs eux-même ne savaient trop de quoi il s’agissait.
Après tout, c’est ce même doublage français qui a attribué momentanément des voix féminines à des personnages avant de réaliser que c’étaient des hommes… Dans la même série où j’ai découvert pour la première fois des hommes aux cheveux longs ou efféminés et coquets... ça faisait beaucoup.

L’adaptation en anime a elle aussi eu des conséquences négatives sur la série. Déjà, à l’origine la série animée s’arrêtait brutalement et ne couvrait pas le dernier arc du manga, qui résout et donne son sens à quasiment tout. Le problème n’a été corrigé qu’une dizaine d’années après avec la sortie vidéo de ce fameux chapitre Hadès mais moi comme d’autres ne connaissaient cette série que par l’anime.
Et avec ses fillers (épisodes supplémentaires de l’anime pour laisser au manga le temps d’avancer), l’anime a du créer des chevaliers n’étant pas basé sur des constellations, un coup de canif dans la logique de la série. Ils ont notamment inventé un maître à un personnage principal alors qu’il en a déjà un dans le manga qui l’influence dès le départ et qu’il affronte plus tard. Forcément, dans l’anime, cette trame est très diminuée, il y a beaucoup moins de tension derrière le duel final de ces personnages et certains des échanges n’ont pas beaucoup de sens. Et je passe les changements d’attitude et même carrément d’apparence de certains personnages.

Mais le manga a aussi ses errements et n’est pas facile à appréhender. Avec la bénédiction de l’auteur, il s’est accompagné de plusieurs séries parallèles mais plutôt que d’enrichir l’univers, je trouve que ça renforce les questions sur certains aspects, avec possiblement des contradictions selon les versions.

L’histoire globale, si vous ne la connaissez pas, c’est celle des chevaliers d’Athéna, la déesse grecque de la guerre. A plusieurs moments dans l’histoire, elle s’incarne en tant qu’humaine dans le but de protéger la Terre d’autres divinités du haut de son bastion : Le sanctuaire en Grèce. Apparaissant en tant que bébé, elle est protégée et épaulée par 88 saints (ou chevaliers), des jeunes gens au pouvoir extraordinaire chacun vêtu d’une armure qui correspond à une des 88 constellations de la voûte céleste (dont le zodiaque ne correspond qu’à une partie… mais il faut bien admettre que les Chevaliers du Zodiaque ça sonne mieux que les chevaliers des constellations).
Dans la série originale, peu après avoir à nouveau été incarnée, Athéna échappe de peu à une conspiration au sein même du sanctuaire, sauvée par le chevalier d’or du Sagittaire. Mourant après sa fuite, il la confie à un japonais qui décide de réunir puis d’envoyer de nombreux enfants (dont il est le père à tous dans le manga.. oui, oui) tenter de remporter des armures et de devenir eux-mêmes des chevaliers. La poignée d’entre eux qui y parviendra devra déjouer la manipulation qui se joue au sanctuaire avant d’affronter les ennemis traditionnels d’Athéna...

Malgré ses défauts, je suis convaincu que St Seiya a largement influencé d’autres œuvres dans son exploitation de reliques magiques ou avec la trame du héros partant du rang le plus bas de son organisation avant de progresser considérablement.
En particulier, le manga Bleach a son arc ‘Soul Society’ qui ressemble fortement à une version plus moderne de l’arc de la bataille du Sanctuaire de St Seiya : Dans les deux mangas, ce sont les protagonistes qui s’attaquent au bastion qui représente normalement leur camp pour sauver la vie de quelqu’un et ils y sont considérés comme des ennemis. On y retrouve même les différentes et riches nuances de loyauté des personnages impliqués.
Je trouve aussi que Bleach a tout comme St Seiya de l’aisance à introduire et exploiter des personnages intéressants, même des antagonistes qui ne sont là que le temps d’un duel. Enfin, et ce n’est pas voulu, mais ces deux séries ont aussi en commun le fait que leur arc final, qui conclut toutes les trames de la série, n’a existé en version animée que de nombreuses années après le début. J’ai déjà mentionné le cas du Chapitre Hadès pour St Seiya. L’anime de Bleach s’est lui aussi arrêté brutalement avant son chapitre final qui serait en cours de production.

Quoi qu’il en soit, St Seiya a aussi la mérite de célébrer la force de volonté et l’épique en mettant en scène des héros qui font face à ce qui semble plus impossible à dépasser. Les personnages de la série originale affrontent des adversaires d’un rang supérieur au leur dans leur camp jusqu’à défier des dieux, une tendance présente dans toutes les séries de l’univers.
Une bouffée d’audace et de positivité, quoi.



Ça c’était l’original. Et la série dont je parle maintenant?

Comme dans le film Les Chevaliers du Zodiaque : La Légende du Sanctuaire, autre réécriture du manga en animation 3D, les armures ne sont plus transportées et peuvent se miniaturiser.

Je ne vais pas y aller par quatre chemins, je ne suis pas vraiment convaincu par cette adaptation/remake dans la forme quand dans son fond même si cette adaptation n’est pas encore terminée et ne compte que 8 épisodes (edit : plus huit autres en Février 2020)
La forme, c’est le choix d’utiliser de l’animation 3D mais je ne la trouve pas très convaincante. Question de goût, je la trouve rigide et en décalage avec l’ambiance des scènes

Dans cette série, Mitsumada Kiddo (à gauche) n'est pas le seul à mettre en place une réponse aux intentions du Sanctuaire, son camarade aussi mais très différemment,à l'aide la technologie.

En ce qui concerne le fond, la série change plusieurs aspects fondateurs du manga original : Entre autres, la situation au sanctuaire n’est pas du tout la même et un nouveau personnage et son armée entrent en jeu. Mais ce n’est pas ce qui me chagrine. Je n’ai rien contre le changement. Je crois même que quand il s’agit d’adapter une œuvre comme celle-ci, c’est justement très intéressant d’offrir un autre regard et traiter les situations différemment.
Cette série a d’ailleurs de très bonnes idées, je trouve, avec des choix plus logiques et plus intéressants qu’à l’origine. Par contre, elle tend à proposer en plus des duels, typiques de l’œuvre, des affrontements en équipe de vagues d’ennemis identiques. Je ne trouve pas ça très intéressant, surtout avec cette animation.
Et cette série a régulièrement du mal à se décider entre restituer l’œuvre originale ou la réinventer, ce qui donne un mélange bancal entre l’hommage et la modification radicale. D’ailleurs, même de base, il y a globalement pas mal de maladresses dans la manière de lier des choses : Dès le premier épisode, une scène est coupée abruptement au milieu d’une action et passe à autre chose l’air de rien, avec de grandes chances qu’on ne revienne absolument pas dessus.
Ensuite, j’ai vu à plusieurs reprises la série ressortir des dialogues quasi-identiques à l’anime même quand ils n’ont plus vraiment autant de sens dans le nouvel environnement de la série comme si les choix n’étaient pas assumés. A l’inverse, des scènes entières ont été transformées ou éliminées par ailleurs. Ça donne des résultats un peu curieux. Je vais donner trois exemples :

Dans cette série, Seiyar, le personnage principal, est repéré et ‘recruté’ pour aller chercher son armure après avoir montré des capacités spéciales, c’est l’objet du premier épisode. Par la suite, comme l’histoire d’origine, il est convoqué dans un tournoi contre ses autres camarades qui sont parvenus à gagner une armure.
Dans l’œuvre originale, ces personnages se connaissent et ils ont même un passé commun puisqu’ils ont tous été regroupés au même endroit avant de partir en quête d’armure. Du coup, aucune introduction n’est nécessaire et c’est normal qu’il y ait des échanges voir des piques entre eux. De plus, le moindre rappel de leur période ensemble par un des personnages est naturellement un rappel sur un morceau du passé des autres. En bref, on connaît globalement leur histoire à tous.
Dans cette série-ci, on connaît seulement le point de vue de Seiyar qui ne connaît personne jusque-là. Est-ce que d’autres se sont rencontrés avant ? Et comment ? Dans quelles conditions sont -ils partis à l’assaut de leur armure ? On n’en sait rien mais quelques remarques issues de l’œuvre d’origine émergent. Elle pourraient être parfaitement justifiées mais la série ne donne pas le moindre début de précision et le premier véritable échange entre les personnages a lieu quand le tournoi va se finir et absolument pas pour se demander comment s’est passé leur recrutement.
Je trouve qu’il y a un manque ici et la série ne fait absolument rien pour le combler.

Dire que dans la série originale les adversaires sont principalement des interessants combattants .

Autre exemple, une grande règle dans l’œuvre originale est que les chevaliers d’Athéna doivent être des hommes. Une femme qui se retrouve tout de même chevalier doit en permanence dissimuler son visage derrière un masque pour éviter la honte.
Cette règle sexiste n’existe plus dans la série Netflix. Mais elle n’est pas accessoire, à l’origine, elle alimente même deux trames de l’œuvre originale. Je ne parlerai que d’une seule des deux : Marine, chevalier de l’Aigle est mentor de Seiyar pour l'obtention de son armure mais à plusieurs reprises, ce dernier se demande si elle ne serait pas sa sœur disparue dans d'étranges circonstances (Circonstances différentes dans les deux versions). Ça a du sens, retrouver sa sœur est une de ses motivations le long de la série alors il s’interroge quelque fois sur les intentions de sa mentor et surtout, étant donné que toutes les femmes chevalier portent un masque, quand il s’interroge sur celui de Marine, ce n’est que par rapport à sa sœur.
A nouveau, un détail qui avait du sens dans le contexte original, devient complètement bancal dans cette série : Pour conserver cette intrigue, Marine continue à porter un masque mais c’est la seule femme chevalier (pour l’instant) à le faire sans justification. Pourquoi ça n’a jamais semblé surprendre qui que ce soit ni même Seiyar qui l’a côtoyée durant les six ans de son entraînement ? Ce sont ces interrogations qui auraient du ressurgir avant tout mais on retrouve à l’identique la trame et les dialogues de l’œuvre originale concernant le cas Marine/La sœur de Seiyar alors qu'un personnage masqué ça ne devrait passer inaperçu pour personne indépendament de la question de recherche de soeur.

A croire qu’ils sont partis du principe que comme ça passait dans l’œuvre originale alors aucune explication n’était nécessaire pour étoffer et rendre plus vivants les différents changements proposés.

Autre modification : La série a transformé Shun, un des personnages principaux en femme. J’avoue que je ne comprends absolument pas l’intérêt de ce changement.
Pour situer, parmi les personnages principaux, Shun est le plus sensible. Quand il était enfant, il était un pleurnichard et le souffre douleur des autres et, même devenu chevalier, il répugne à se battre et cherche toujours une solution pacifique. C’est encore davantage renforcé dans l’anime à cause des combats rajoutés. Comme il a rarement d’excellentes raisons pour se battre dans ces passages ajoutés, il se fait très souvent secourir.
Je peux ajouter qu’il est chevalier d’Andromède et se bat avec une chaîne qui le protège et attaque à sa place. On est typiquement dans le type de personnage qui est plutôt incarné par une femme dans un groupe de héros de dessin animé des années 80/90 , en tous cas les traits qu'auront la plupart du temps la femme du groupe s'il y en a une: Empathique et qui combat à distance. Le temps d’une poignée d’épisodes, Shun avait même une voix de femme durant ses premières interventions dans le doublage français de l’anime.
La série aurait par contre vraiment bousculé les choses si elle avait transformé Ikki en femme. Ikki, chevalier du Phoenix est l’électron libre du groupe, solitaire, ténébreux, terriblement puissant et surtout à la base le frère aîné protecteur de Shun. J’aurais trouvé énorme s’il était devenu la grande sœur, qui aurait protégé puis entraîné son petit frère et qui lors de leurs retrouvailles le traiterait de lâche et de pleurnichard, exactement comme dans l'histoire originale...et aussi dans cette série.
Ça, ça aurait été un changement percutant, beaucoup plus que l’inverse. Il y aurait eu des protestations, clairement, mais ça aurait vraiment un véritable changement. Car Shun en femme, je n’en saisis pas l’impact et l’interêt.

En bref, Knight of the Zodiac propose des idées pour rendre hommage au manga culte mais même si certaines sont intéressantes, la série reste une copie qui ne va pas au bout des conséquences de ses choix. Pour l’instant, du moins.

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